À quels temps modernes avons-nous affaire ? Charlot se réveille dans un monde où la cadence des machines ordonne tout. Chaque séquence dans l’usine est une pépite d’inventivité et de réflexion politique. Nous comprenons la gamine qui vole des bananes, en revanche nous ne comprenons pas une société riche qui tolère la misère sociale. Le film semble composé d’une suite de gags issus du muet. Cette apparente régression s’accompagne d’un travail élaboré sur une bande sonore hybride qui rend compte de cette société inégalitaire. Seule la voix du patron est audible, incarnation du capitalisme et du taylorisme. La cadence, comme la parole, est un enjeu de pouvoir et d’aliénation. L’amour est l’unique force vitale qui permet à Charlot de se relever. Chanter devient dès lors cet espéranto où pour la première fois Chaplin fait entendre sa voix. À la sortie du film, il est accusé de communisme et interdit en Allemagne.
Nadia Meflah